Dans de nombreuses cultures, les peuples ont développé le mythe d’une époque paradisiaque, un temps d’avant le temps où la mort n’existait pas.

L’explication du monde et de ses immortels, nous entraîne dans un voyage jalonné d’images violentes ou paisibles mais toujours révélatrices de quelque vérité éternelle.de l’Au-delà

La pensée mythologique constitue les premières idées qui sont à la base de notre conscience moderne. Ces histoires et légendes issues du fin fond des ages évoquent les questions fondamentales de l’existence, telles que le mystère de la mort et de la vie après la vie.

Naissance, mort et renaissance règlent le cycle de l’existence. Tant dans les grandes traditions mythiques que dans les religions, l’ascension vers le ciel, vers l’empire des dieux, est au centre des préoccupations de l’humanité. Le chemin qui y conduit et que l’âme de l’homme ou du héros doit suivre, est représenté le plus souvent par d’anciens motifs mythiques que la simplicité de leur expression rend convaincants. Les images mythiques sont les chars célestes tirés par des coursiers ailés ou de grands oiseaux, le plus souvent messagers du soleil qui emportent les âmes dans le monde supérieur. Nous trouvons dans les mythes grecs ou dans l’ancienne religion iranienne du manichéisme des messagers des dieux comme guides des âmes. Le symbole de l’échelle divine ou de l’Arbre de vie central, reliant les enfers, la terre et le ciel, était aussi largement répandu. Les shamans, les sages et les âmes bien trempées parvenaient à gravir les degrés de l’échelle, voie de purification, tandis que les méchants étaient précipités en enfer.

Ainsi à Babel (où, si l’on en croit le récit biblique, les hommes avaient construit une immense tour dont le sommet devait toucher le ciel) signifiait en akkadien « Porte du Ciel » et il semble bien que la fonction essentielle de toutes les ziggourats mésopotamiennes était d’établir un lien entre Ciel et Terre. C’était là que le roi et la reine reconstituaient le mariage sacré des origines.

Dans le folklore européen, les mâts de Cocagne à la cime desquels étaient suspendus jambons et victuailles rendus inaccessibles par le savon dont on enduisait le tronc, renouaient avec cette ancestrale nostalgie de l’Age d’Or, cet irrépressible désir de retrouver un instant les joies du ciel devenu demeure interdite une fois rompu le pacte entre les dieux et les hommes. Les innombrables déluges qui hantent les cosmogonies attestent de la violence de cette rupture.

Si dans la plupart des mythes le passage du ciel à la Terre est devenu, après la fin de l’Age d’Or, une transgression risquée, il existe dans certaines traditions des initiatives divines ayant pour but de reconstituer l’alliance interrompue.

Ainsi chez les Grecs, la déesse Iris, vêtue d’un voile couleur d’arc en ciel qu’elle déploie dans les airs, symbolise-t-elle une liaison retrouvée entre les dieux et les hommes. L’arc en ciel est perçu dans de nombreuses cultures comme une matérialisation de l’alliance, il réunit les eaux inférieures et les eaux supérieures, reconstituant les deux moitiés de l’œuf cosmique. Il apparait dans l’Ancien Testamentt au dessus de l’Arche, après le déluge, comme un signe de restauration. Il y préfigure en même temps l’inscription du carré du nouveau cosmos dans le cercle irisé de la plénitude divine.

Chez les Dogons du Mali, l’arc en ciel est appelé « chemin du ciel et de la terre » et beaucoup de peuples y voient un « pont des âmes » permettant aux défunts de rejoindre leur céleste séjour.

L’Afrique

L’origine de la Mort

De nombreuses cultures africaines incluent un mythe qui donne une explication de la mort.

Les Zoulous racontent que le Créateur a envoyé Unwabu le caméléon dire aux humains qu’ils ne mourraient pas, tandis qu’Intulu, le lézard, était chargé de leur dire le contraire. Le caméléon traînassa en route, mais le lézard fonça tout droit et transmit son message en premier.

Pour les Hottentots, c’est la Lune qui aurait envoyé un insecte annoncer :  » … comme je meurs, et mourant je revis, ainsi en sera-t-il pour vous « . En chemin, le messager rencontre le lièvre. Celui-ci lui dit qu’il est meilleur à la course et qu’il se charge du message. En arrivant sur terre, il traduit en ces termes le message de la Lune :  » … comme Je meurs, et en mourant disparais, ainsi mourrez-vous et disparaîtrez-vous entièrement.  » À son retour, le lièvre fait son rapport à la Lune. Dans sa colère, celle-ci le frappe sur le nez. C’est depuis que les lièvres ont le museau fendu, mais les gens croient toujours ce que le lièvre leur a dit.

Croyances

Dans l’animisme plus évolué des sociétés archaïques, écrit L. V. Thomas, « on s’efforce de nier la mort en affirmant qu’elle est privation existentielle et l’existence est alors celle de l’individu, plutôt que négation essentielle : destruction du tout apparent qu’est le moi, mais jamais destruction de tout.

Pour les Noirs d’Afrique par exemple, la vie au sens le plus fort, n’est pas individuelle, mais groupale, et la mort joue sur la manifestation secondaire, l’individu ». Pour les Bambaras, le « double » après la mort va vivre « ailleurs » : sous l’eau, gardé par un génie, mais seulement en attendant de pouvoir rejoindre le groupe en occupant le corps d’un nouveau-né. Ils admettent aussi, il est vrai, l’existence d’un second principe immatériel : l’âme vitale, recueillie après la mort par des rites spécifiques dans l’autel des ancêtres. Ces croyances concernant l’âme et l’au-delà sont diversifiées selon les ethnies et les continents.

Le Vaudou

Les dieux vaudous d’Haïti (et leurs équivalents des cultes candomblé et sanîeria du Brésil) sont issus des mythologies d’Afrique occidentale, mais ils se sont transformés, dans le Nouveau Monde, sous l’influence de l’esclavage et du catholicisme. Le mot vodou signifie  » dieu  » en langue fon, et loa est le mot congolais pour  » esprit « . Le vaudou compte de nombreux loas, dévoués à l’homme tant que celui-ci les accueille et les nourrit. La mythologie en elle-même, si l’on entend par là récit de la Création ou hauts faits de héros, est très réduite. En effet, les dieux, ou esprits, interviennent directement dans la vie des fidèles – au point de les posséder au cours des rites vaudous. Le caractère et les attributs des dieux en tant qu’êtres vivants sont donc moins importants que leur histoire. Une manifestation remarquable en a été donnée lorsqu’une troupe de Guédés (prêtres vaudous possédés par l’esprit du maître des morts, Guédé ou Baron Samedi) a envahi le palais présidentiel prouvant ainsi la capacité des esprits à jouer un rôle important dans le présent et l’avenir d’Haïti.

Esprit maléfique

Le défunt convenablement honoré par les vivants après sa mort, devient esprit favorable et bénéfique. Mais plus généralement, comme le disent les Bana du Cameroun : « Si bon que le mort ait été de son vivant, dès qu’il a expiré, son âme ne pense plus qu’à faire le mal. » Surtout s’il a eu une « mauvaise mort », spécialement du fait d’un assassinat ou d’un accident. Il crie alors vengeance et ne s’apaisera que lorsque l’on aura puni l’auteur de l’action maléfique.

En Grèce antique

Vers le VIe siècle avant Jésus-Christ arrive de l’Orient, de Thrace et peut-être d’Inde, l’idée de la transmigration des âmes. On en trouve les premières traces dans l’Orphisme. Cette religion de salut, culte à mystères inspiré du personnage mythique d’Orphée, enseignait que l’âme, prisonnière d’un corps créé par les Titans, était condamnée au cycle perpétuel des réincarnations du fait d’une souillure primitive. L’initiation orphique, accompagnée d’une certaine ascèse, permettait à l’âme d’avoir accès au monde divin et la libérait de la métempsycose.

Les Champs Élysées

Les croyances populaires, chez les Grecs de l’ère classique, s’enracinaient dans la mythologie traditionnelle : un Hadès souterrain (ou situé dans une île lointaine) entouré des quatre fleuves du Styx, de l’Achéron, du Cocyte et du Pyriphlégéton, que l’on atteignait grâce au Cocher Charon et à sa barque. Les mystères d’Eleusis vont y situer également trois Juges évaluant les mérites des défunts, aidés par le chien Cerbère à la triple gueule.

On distingue habituellement deux contrées dans ce monde d’outre-tombe :

– les Champs Élysées destinés aux justes, dans un paysage de prairies, de fleurs et d’arbres merveilleux baignant d’une douce lumière (on retrouve ces descriptions dans les actuels récits des personnes revenues d’un coma avancé et d’une « expérience aux portes de la mort » ou nde),

– le Tartare, lieu de supplices éternels pour les méchants décrit à la fois comme un abîme, un brasier et une salle de torture. Dans le peuple, l’idée courait que cet Hadès était le lieu de séjour du double corporel, tandis qu’une sorte d’ «âme» demeurerait près de la famille, qu’il fallait honorer par des offrandes rituelles.

Les classes cultivées, dans la suite des philosophes ( Socrate, Plato), ne croyaient plus guère à l’imagerie populaire, et s’inspiraient de schémas philosophiques.

Les mystères d’Éleusis

Les mystères d’Éleusis font partie des rituels les plus profonds et les plus secrets de la religion grecque. C’étaient eux, pensait-on, qui « constituaient le ciment de la race humaine ». Il était donc essentiel d’en célébrer chaque année les rites.

Les Grecs, en effet, estimaient que les enseignements les plus sacrés ne pouvaient être communiqués qu’à ceux qui étaient passés du monde profane au monde divin grâce à l’initiation. De la même façon, non seulement les oracles, mais beaucoup de poètes et la plupart des philosophes usaient de symboles, d’allégories et parfois d’énigmes tels qu’ils n’étaient compris que de ceux qui en étaient dignes.

Les initiés étaient considérés comme des êtres d’une essence supérieure, car ils avaient eu une vision de la vie dans l’autre monde; l’âme, immédiatement après la mort, errant dans les ténèbres, et assaillie par toutes sortes de terreurs, avant d’être éblouie par une clarté soudaine et d’apercevoir le séjour des bienheureux.

Tout laisse donc à penser qu’il s’agissait d’un processus de mort suivie d’une renaissance, tel qu’on en trouve dans la plupart des religions traditionnelles. De ce fait, les mystères peuvent non seulement se comparer aux initiations égyptiennes, mais être rapprochés des pérégrinations de l’âme, telles que les décrivent aussi bien le Livre des morts égyptien que le Bardo Thôdol tibétain.

Ces « Mystères » furent célébrés pendant deux mille ans, et ne prirent fin qu’en 396 av. J.-C., avec le sac d’Éleusis par Alaric, roi des Goths.

Les mystères d’Éleusis procèdent du mythe de Déméter.

La déesse, ayant perdu sa fille Koré (Perséphone), enlevée par le dieu des Enfers, Hadès (Pluton), et ayant appris que Zeus lui-même avait décidé cette union, décida de ne pas regagner l’Olympe. Prenant l’apparence d’une vieille femme, elle s’arrêta à Éleusis, où elle accepta de nourrir le dernier-né de la reine, Démophon. Afin de rendre l’enfant immortel et éternellement jeune, elle le cachait la nuit dans les braises du foyer. La reine, ayant découvert ce que faisait la déesse, s’affola, et interrompit le processus d’immortalisation. La déesse, apparue dans toute sa splendeur, déplora l’aveuglement des hommes et demanda qu’on élevât un temple et un autel, où elle enseignerait ses rites aux humains. Ayant obtenu de Zeus le retour de Perséphone – qui ne passerait plus que les quatre mois d’hiver auprès d’Hadès et le reste de l’année à la surface du sol -, Déméter regagna l’Olympe, tandis que la terre desséchée reverdissait. Mais, à l’avenir, une déesse olympienne bienveillante régnerait sur les Enfers et y accueillerait les initiés.

Dès lors furent honorées à Éleusis les deux déesses de la terre féconde. Ce mythe permet d’approcher la signification probable des mystères; il s’agirait, après des purifications préalables, d’un processus de régénération, de modification radicale de la condition humaine, grâce auquel l’initié recouvrait une immortalité perdue, devenue seulement potentielle. Les mystères procuraient donc aux individus les plus évolués spirituellement ce que la religion officielle ne pouvait leur donner; ils en étaient le complément et l’on comprend à la fois l’attrait qu’ils exercèrent et le secret que l’on gardait sur eux. Les initiations «éleusiniennes» étaient ouvertes à tous ceux qui parlaient grec – hommes et femmes, y compris les esclaves – et qui n’avaient pas commis de meurtre. Les candidats devaient participer d’abord, au printemps, aux « petits mystères », rites purificatoires, dirigés par un mystagogue, avant de se présenter aux «grands mystères», qui avaient lieu à l’automne et duraient huit jours ; ils comprenaient un bain rituel dans la mer, une procession solennelle d’Athènes à Éleusis, suivie d’une journée de jeûne et de purification. Celle-ci culminait dans la révélation soudaine d’objets sacrés, violemment éclairés (l’epoptera), accessible seulement à ceux qui avaient été initiés l’année précédente.

Orphée

Apparu dans les textes grecs à partir du VIe siècle av. J.-C., l’orphisme procédait, selon la tradition, d’Orphée, être à demi divin, originaire de Thrace qui charmait les animaux sauvages et descendit aux Enfers. Le personnage d’Orphée peut être rapproché des anciens chamans, et l’orphisme est sans doute une reviviscence de croyances et de rites préhelléniques, constituant une réaction contre le système politico-religieux de la cité. Ce n’est que tardivement que l’on invoqua comme raison de sa descente aux Enfers la perte de son épouse, Eurydice. Contrairement à l’engagement qu’il avait pris, Orphée se retourna et perdit celle-ci de nouveau, cette fois définitivement. Inconsolable, Orphée aurait été massacré par des femmes jalouses, les Bacchantes, mais sa tête coupée vogua sur les eaux sans cesser de chanter. Cette légende qui devait rester célèbre ne fut élaborée par les poètes latins Virgile, et Ovide, dans les Métamorphoses.

Chez les Latins

Les inscriptions que l’on trouve sur les tombes des Romains de la grande époque – celles-ci étaient placées souvent le long des routes pour que les défunts n’aient pas le sentiment d’être mis à part et oubliés – expriment à la fois un certain matérialisme exaltant les joies de la terre, et un certain scepticisme sur l’au-delà. Sa description, telle qu’on la trouve au livre VI de l’Énéide de Virgile, est marquée par l’influence grecque classique. Énée entre par une grotte dans le séjour des Enfers, arrive au bord de l’Achéron, le traverse sur la barque de Caron, amadoue le chien Cerbère, laisse sur la gauche le chemin des lieux de torture du Tartare et prend à droite le chemin des non moins classiques Champs Élysées baignant dans la fraîcheur et la lumière, où il pourra bénéficier des multiples distractions du gymnase, du théâtre et de l’académie. Il voit encore des âmes buvant une eau qui leur permet d’oublier leur vie précédente afin de pouvoir renaître. Anchise lui montre un défilé d’âmes destinées à renaître et qui deviendront de grands Romains, parmi lesquels Romulus et les empereurs de Rome

Notons toutefois qu’à la période antérieure, les Romains partageaient aussi certaines représentations des croyances populaires des Étrusques et des anciens Latins. Pour ceux-ci les défunts continuaient à vivre dans la tombe une vie en demi-teinte. On doit leur offrir des cultes funéraires car ils demeurent présents dans la famille. Les Mânes des Ancêtres sont gardiens du foyer, et on leur dédie aussi des honneurs constants par des offrandes quotidiennes et des fêtes à date fixe. Bien différente de ces croyances populaires est la philosophie des Stoïciens, pour lesquels l’existence d’ici-bas n’est qu’une propédeutique pour l’au-delà.

En Mésopotamie

Entre le Tigre et l’Euphrate, du IVe millénaire au VIe siècle avant notre ère, sur le pays correspondant approximativement à l’actuel Irak, se sont succédé de multiples civilisations – babylonienne, assyrienne, sumérienne, phénicienne, – civilisations évoluées mais marquées par le peu d’attention donnée à la mort et un pessimisme radical sur l’au-delà. On se le représente comme un monde souterrain dénommé la Terre sans retour, la Terre lointaine, la Maison des Ténèbres et de la poussière.

L’épopée de Gilgamesh

Enkidu, le compagnon de Gilgamesh dans la grande saga suméro-akkadienne, y voit en songe comme « la maison où l’on entre sans espoir d’en sortir » par « la route dont les chemins ne servent qu’à l’aller et jamais au retour », comme « la demeure dont les habitants manquent de lumière » et où « la poussière est leur nourriture, leur aliment, la boue ». Pour pénétrer dans ce lieu sinistre, l’Arallou, l’ombre doit accomplir un périlleux voyage en passant en particulier les sept enceintes par sept portes, avant de traverser le fleuve infernal sur la barque du passeur des ombres, Khoumout Fabal. Les rites funéraires l’aident dans ce périple. Si elle échoue, la mort restera pour hanter les vivants.

Devant de telles perspectives, un seul espoir anime les Mésopotamiens : acquérir l’immortalité, à l’instar de Gilgamesh dans sa quête inlassable. Mais hélas c’est toujours l’échec. La leçon dernière sera donnée à notre héros par Siduri la cabaretière : « 0 Gilgamesh, pourquoi erres-tu de tout côté ? La vie que tu poursuis, tu ne l’atteindras pas. Lorsque les dieux ont créé le genre humain, Ils lui ont fixé le destin de mourir Et ils ont gardé l’immortalité entre leurs mains. Pour toi, 0 Gilgamesh, remplis ton ventre ! Jour et nuit, fais bombance ! »

Les Hittites

A la différence de l’Égypte qui avait ouvert les portes de la survie à tout le peuple et non plus seulement aux pharaons, les Hittites réservaient la pleine vie dans l’au-delà aux seuls souverains. Ils partageaient la vie des dieux dans un décor fastueux et bucolique. Devenus dieux eux-mêmes, les couples royaux étaient l’objet d’un culte se prolongeant dans les grands rites funéraires de quatorze jours destinés à leur ouvrir la porte du monde céleste : incinération, dépôt des ossements en place d’honneur, offrande de bœufs et de moutons, repas cultuels. Autre était le salut des gens du peuple. Ils poursuivent une survie peu enviable dans le monde des Enfers, lieu de séjour des dieux détrônés. On y accède par des rivières qui font penser à l’Achéron hellène. On y rencontre sept portes, comme chez les Babyloniens, et neuf lacs ou cours d’eau. Les survivants essayent d’apaiser les morts par des offrandes de pain et de miel, pour que ceux-ci ne reviennent pas les tourmenter, spécialement en s’incrustant dans la maison de la famille.

Chez les primitifs

A l’âge du renne on l’enterre dans les grottes-abris des vivants, parfois sous le foyer, comme pour établir un lien de continuité avec le disparu. Le corps est souvent peint en rouge, retenu à l’occasion par des pieux ou des os le fixant au sol :  » pour qu’il ne revienne pas tourmenter les vivants  » diront certains primitifs actuels. Ces rites d’inhumation laissent déjà entendre qu’ils sont intentionnels. Le doute n’est plus permis à l’époque néolithique où commencent à apparaître des sépultures purement artificielles : dolmens, tombes recouvertes de cinq dalles plates, tumulus.

Le mort est presque toujours enseveli avec ses objets familiers, ses armes, ses bijoux. Il est souvent inhumé en position repliée, les genoux sur la poitrine ; parfois incinéré. Se soucier ainsi du corps du défunt, l’entourer de pratiques rituelles codifiées, semble signifier : qu’on perçoit en lui une réalité exigeant culte et respect, dans l’idée qu’il poursuit  » ailleurs  » des activités personnelles pour lesquelles il a encore besoin de son environnement familier ; qu’il faut se préserver d’éventuelles actions hostiles de sa part ; voire qu’il existe en lui un principe indépendant du corps. L’étude ethnographique des sociétés archaïques dites  » primitives  » va éclairer certaines de ces hypothèses.

Celtes

Les Druides

Les Druides représentent le niveau le plus élevé de la classe des prêtres chez les Celtes des îles Britanniques et en Gaule. Nous connaissons ce peuple qui, venant des régions du Danube, envahit le pays gaulois dans le Ve siècle avant notre ère, à travers les descriptions des auteurs romains et en particulier de César. La caste sacerdotale druidique, tout en étant étroitement associée au pouvoir politique, était dépositaire du savoir sacré et profane, des sciences théologiques et médicales. Or les témoignages antiques sont unanimes à souligner dans l’enseignement druidique la croyance en l’immortalité de l’âme. L’abondance de sépultures et la richesse qui les accompagne – outils, bijoux, aliments, mobilier funéraire – témoignent pour l’ensemble des pays celtes de cette croyance. La mort n’est qu’un voyage vers d’autres contrées merveilleuses, peut-être l’île décrite dans le Voyage de Bran où l’on coule une vie semblable à celle de dieux dans un pays de rêve. L’Irlande se représente cet au-delà comme un séjour permanent, le Si’d (« paix ») localisées dans ces îles où sous des tertres s’abolissent temps, espace, guerre, hiérarchie sociale, – à la différence du Valhalla, germanique réservé aux héros et en particulier aux guerriers tombés sur le champ de bataille. Les âmes des défunts y sont conduites par une déesse prenant fréquemment l’aspect d’un cygne ou d’un oiseau merveilleux.

Le Gaulois

Le Gaulois par contre est toujours enterré avec ses armes, parfois son cheval : car il mènera par la suite dans l’autre monde – l’orbis alius dont parle Lucain (I, 453) – une vie glorifiée mais semblable à celle d’ici-bas, avec ses combats et sa vie sociale. « Valère Maxime affirme même que les gaulois empruntaient de l’argent, et trouvaient prêteur en s’engageant à rembourser dans l’autre monde, ou confiaient à leurs défunts des lettres pour leurs proches déjà décédés. »’ D’où la bravoure au combat des combattants gaulois, leur total mépris d’une mort qui ne représentait pour eux qu’un passage vers une forme infiniment supérieure.

On suppose aussi que cette témérité tenait à l’espérance d’une réincarnation future. De fait les druides ont pu enseigner, dans la suite des pythagoriciens, la métempsycose, l’âme du défunt pouvant même émigrer dans un animal. Tuan, personnage mythique du Livre des conquêtes de l’Irlande incarnerait la mémoire historico-légendaire de l’île qu’il aurait reçu mission de révéler après plusieurs vies animales.

L’Égypte

Les pharaons ne pouvaient être détruits, même par la mort. Leur prétention à l’immortalité reçut un vif encouragement lorsque les Égyptiens découvrirent la technique de l’embaumement des cadavres.

En tant que rois divins, les pharaons ne pouvaient être détruits, même par la mort. Leur prétention à l’immortalité reçut un vif encouragement lorsque les Égyptiens découvrirent la technique de l’embaumement des cadavres. Leur vie éternelle s’abrita dans les immenses pyramides des premières dynasties. Plus tard, le culte des morts et la croyance en l’immortalité se répandirent : sous la XVIIIe dynastie (1567-1320 av. J.-C.), ceux qui pouvaient se payer des funérailles en bonne et due forme avaient l’immortalité assurée. On écrivit des manuels pour les y guider, les Textes des sarcophages, ainsi nommés parce qu’ils étaient souvent placés dans les cercueils ; le plus célèbre est le Livre pour sortir au jour, souvent appelé le Livre, des morts égyptien.

Les Égyptiens confortèrent leur croyance en développant des techniques magiques qui devaient les aider pendant la mort, ainsi que le culte de dieux et de déesses capables de les secourir. Parmi les plus connus de ceux-ci, il y a Isis et Osiris.

Osiris fut d’abord un dieu de la fertilité localisé en basse Égypte. Comme il pouvait créer la vie à partir du sol inerte, il fut décrit comme étant mort lui-même, puis comme le souverain du séjour des morts. Lorsque les pharaons voulurent affirmer leur pouvoir sur la mort, ils firent d’Osiris l’égal de Rê et, pour mieux encadrer les comportements individuels, ils relevèrent au rang de juge des défunts. On dit alors qu’Osiris avait civilisé l’Égypte, en la faisant renoncer au cannibalisme.

Le culte d’Isis, à l’origine indépendant et localisé dans le nord du delta, se combina plus tard avec celui d’Osiris pour constituer un mythe et un culte du soleil mourant et renaissant. Quand Osiris fut tué par son méchant frère Seth, Isis retrouva son corps, en conçut un fils et l’embauma pour lui rendre l’immortalité. D’autres épisodes furent ajoutés, toujours sur le thème de la vie surgissant de la mort.

Les instances de la vie éternelle égyptienne :

Le Ba qui correspondrait à l’âme, peut-être à la conscience individuelle, était libéré à la mort et symbolisé par un oiseau à tête humaine. Relativement indépendant, il avait besoin néanmoins d’offrandes matérielles.

Vakh serait l’esprit immortel, le principe lumineux avec lequel l’individu s’identifie soit après la mort physique, soit après la mort symbolique, l’initiation.

Le ka, enfin, pourrait se définir comme l’« énergie vitale ». Afin de se perpétuer, il lui fallait un support: la momie du défunt, sa statue, ou une simple image, peinte ou gravée. Appelés «serviteurs du ka», les prêtres funéraires fournissaient la nourriture du ka. Guidant celui-ci, le Livre des morts lui permet de « sortir au jour».

S’efforçant de faire, de leurs tombeaux des lieux d’agréable séjour, les Égyptiens en décoraient les murs de peintures représentant des scènes de la vie quotidienne.

Les Nordiques

Les croyances sur l’au-delà

Les Vikings avaient quantité de croyances concernant l’au-delà. Ceux qui mouraient de maladie ou de vieillesse allaient au royaume de Hel, une sorcière, fille de Loki, le dieu malin. C’était un domaine ténébreux dont les parois étaient un entrelacement de serpents se tortillant; dans la salle de banquet, le couteau se nommait Faim et l’assiette Famine. En revanche, les honneurs assuraient une sorte d’immortalité car les exploits fameux étaient rappelés tout au long des générations ou exaltés par les chants des bardes. Les guerriers qui mouraient au combat recevaient l’aide des Valkyries, jeunes filles de l’entourage d’Odin, lesquelles les emmenaient au Valhalla pour y banqueter et y passer le temps en tournois.

Odin et le Walhalla

On disait qu’Odin faisait venir les rois et les héros morts à la guerre dans son Palais des Morts, le Walhalla, où ils passaient leur temps à festoyer et à combattre, prêts à défendre Asgardr en cas d’attaque. Le Walhalla se trouvait peut-être à l’origine sur le tombeau où les morts festoyaient avec leurs ancêtres. Mais dans la littérature des Vikings, le royaume des morts remarquables était plus grandiose et l’on y entrait avec cérémonie : les héros morts étaient escortés à travers les airs jusqu’au domaine d’Odin à Asgardr par des divinités guerrières, les Walkyries.

Le VALHALLA

Le palais des morts à ASGARD,

Le pays des dieux fut bâti pour abriter l’immense armée qui combattrait lors du

RAGNARÖK, le crépuscule des dieux.

Le Ragnarok

Un trait particulier de la religion des Vikings est Ragnarok, la lutte finale au cours de laquelle les dieux et les forces du mal s’entretueront. De cette destruction naîtra un monde nouveau, à partir d’un nouveau couple, Lif et Lifthrasir. Ils n’adoreront pas les Ases mais le Dieu tout-puissant qui réside à Gimié, le paradis situé au-dessus de tout. Ce dernier point représente probablement une synthèse de la mythologie scandinave et du christianisme en progrès dans les pays nordiques.

Le Ragnarök était le crépuscule des dieux germaniques. Après un terrible hiver, un ultime combat opposa les dieux et les géants de la glace. Aux cotés d’ODIN et des dieux, étaient les morts glorieux tombés au combat et emmenés à VALHALLA, tandis que les morts indignes rejoignaient les géants de la glace. ODIN était incapable d’empêcher la catastrophe. La puissante forteresse d’ASGARD fut détruite par un géant de feu. L’énorme serpent cosmique surgit de l’océan et engloutit le champ de bataille, les loups avalèrent le soleil et la lune, …. Les neuf mondes brulèrent et la terre coula dans l’océan.

Deux humains et plusieurs dieux – dont les fils d’ODIN- survécurent et repeuplèrent le monde.

Odin

Odin, malgré toute sa sagesse et son pouvoir, fut incapable de s’opposer au crépuscule des dieux. Odin acquit la connaissance des runes auprès des morts. Toutefois, il ne réussit qu’à renforcer sa lecture anticipée du destin.

Il savait qu’il trouverait la mort lors de cette bataille finale qui opposerait les dieux et les géants sur le champ Vigrid.

Ici, il grave des runes magiques sur une lance, décrivant la conduite des géants et des nains, des dieux et des mortels

Les Walkyries

Les Walkyries sont des êtres surnaturels qui jouent des rôles divers : elles partagent la vie d’Odin dans le palais du Valhalla, où elles servent de la bière aux ombres des soldats morts ; elles participent aux combats en armure et décident de la victoire et de la défaite. « Walkyrie » signifie littéralement « Celle qui choisit qui succombera ». Deux Walkyries, Gunn et Rota, choisissent ceux qui doivent mourir, en compagnie de Skuld (la Nécessité), la plus Jeune des Nornes, l’une des trois Destinées. Les Walkyries entretiennent une relation privilégiée avec les guerriers « beserks » qui, inspirés par la fureur guerrière d’Odin, se défont de leur armure pour se livrer au combat avec une force surnaturelle. Les beserks ont toutes les chances de mourir au combat, et donc de gagner une place au Valhalla. Pour les Scandinaves, le Va-halla est une vaste salle resplendissante d’or, au toit recouvert de boucliers. Sa charpente est faite de lances et la grande salle, percée de cinq cent quarante portes. Chacune de ces portes est assez large pour laisser sortir de front huit cents guerriers, lorsqu’ils seront convoqués pour la bataille finale du Ragnarok.

Civilisations précolombiennes d’Amérique centrale

 » Les conceptions aztèques relatives à l’au-delà reflètent la complexité de la société aztèque au début du XVIe siècle « , écrit J. Soustelle. On constate en effet que le sort réservé aux morts variait suivant la manière dont ils étaient décédés : selon leur destin et la volonté des dieux.  »

Le Tialocan était réservé à ceux qui étaient morts noyés, frappés de la foudre ou victimes de maladies considérées comme d’origine aquatique. Dans cet immense jardin toujours verdoyant et bien arrosé s’ébattent les bienheureux protégés de Tialoc « , grand dieu de l’eau fécondante, de la pluie et de l’orage, au centre de la religion de Teotihuacân – ville située sur le plateau central du Mexique qui fut du Ier au VIIe siècle le foyer d’une brillante civilisation.  » Les guerriers morts au combat ou sur la pierre du sacrifice, ainsi que les négociants morts pendant leurs lointaines et dangereuses expéditions, devenaient « compagnons de ‘aigle » et tonnaient cortège autour du soleil depuis son lever jusqu’au Zénith.  »

La réincarnation joue pour les guerriers et les nobles. Après avoir séjourné pendant quatre ans dans les  » demeures du soleil « , ils renaissent sous forme d’oiseaux brillants, de colibris. Mais les femmes mortes en couche quittent les mêmes demeures pour se réincarner en êtres divinisés frappant parfois de paralysie ceux qu’elles rencontraient dans les rues de Mexico.  » Quant aux autres défunts, ils étaient censés parcourir sous la terre, dans le monde obscur de Mictian – le séjour des morts, zone de froid et de ténèbres située sous les steppes du nord du Mexique, un trajet semé d’épreuves : rochers qui se heurtaient, vents furieux et glacés, et monstres dévorants.  » Ils avaient à franchir les neuf fleuves, neuf étant le chiffre de la nuit et de la mort, avant d’être définitivement anéantis dans le Neuvième Enfer.

Les Indiens Guarayù de Bolivie

Les Indiens Guarayù de Bolivie nous parlent du parcours de l’âme après la mort, lorsque celle-ci doit choisir entre deux chemins pour arriver jusqu’à Tamoi, le Grand Père, qui vit quelque part vers l’Ouest. L’un des chemins est large et aisé, l’autre, étroit et dangereux. L’âme doit choisir le sentier difficile et surmonter de nombreuses épreuves avant d’arriver à destination, où l’attendent rafraîchissements et réconfort. Une fois lavée dans le bain de jouvence du Grand Père, l’âme régénérée pourra recommencer à rire, chasser, vivre et aimer dans la terre de l’Ouest.

Les Héros

Odin, le Père de Tous

Selon la croyance viking, Odin, le Père de Tous, était le roi d’Asgardr et avait hérité de Tiwaz la lance qui lui assurait le contrôle des batailles. Son prédécesseur Wotan était le roi suprême des Langobards et d’autres tribus germaniques. Odin, comme Wotan, a des liens étroits avec le Monde souterrain et les morts. Dieu des Rois, il apportait son soutien aux jeunes princes prometteurs et leur donnait des épées magiques et autres cadeaux en témoignage de sa bienveillance, mais il les anéantissait impitoyablement le moment venu.

La crémation, souvent nécessaire pour se débarrasser des morts après le combat, était en rapport avec le culte d’Odin. De nombreux contes parlent des fidèles compagnons d’Odin, les berserkir, qui, lors des batailles, portaient des peaux d’ours ou de loup et entraient en transe, ce qui les rendait insensibles à la douleur. Ce don de la transe, Odin l’accordait également aux poètes et aux orateurs, et l’on trouve de nombreuses références dans la poésie islandaise à la manière dont il se procura l’hydromel magique qui donnait l’inspiration. Odin apportait aussi la fortune à ses compagnons – symbolisée par son anneau Draupnir qui, en se multipliant, fournissait une réserve d’or.

De plus, Odin était un dieu de la Magie et de la Divination, notamment dans un contexte militaire. On lui offrait en sacrifice des prisonniers de guerre, que l’on poignardait ou pendait. Sacrifices qui pouvaient constituer une forme de divination puisqu’on croyait que les derniers mouvements des victimes annonçaient la victoire ou la défaite. Odin lui-même s’offrit en sacrifice en se pendant à l’Arbre du Monde, dans le but d’obtenir la science des symboles runiques qui étaient utilisés pour la divination. Il donna aussi un de ses yeux par amour de la connaissance, et apparut sur terre sous l’apparence d’un vieil homme borgne vêtu d’un grand manteau et d’un chapeau à larges bords ou d’un capuchon. Il était toujours accompagné de loups et de corbeaux, animaux des champs de bataille, et se trouvait constamment informé par deux corbeaux de ce qui se passait sur tous les champs de bataille du monde. Odin savait parfaitement changer d’apparence, envoyant son esprit dans le corps d’un oiseau ou d’un autre animal, ce qui – avec sa capacité à voyager dans le royaume des morts – l’apparentait aux chamans des peuples eurasiens du Nord.

Énée se rend aux Enfers

Le poète romain Virgile nous raconte qu’Énée se rend aux Enfers pour y rendre visite à son père Anchise. Mais, quand il veut l’embrasser, il n’étreint que de l’air. Il voit ensuite les âmes s’approcher en masse pour boire l’eau de l’oubli, et faire disparaître ainsi tout souvenir de leur vie antérieure afin de pouvoir renaître. Lorsque le héros demande à Anchise ce qui se passe, le vieillard lui répond qu’au commencement le monde n’était qu’esprit, mais que nous nous sommes attachés à la vie tant par amour que par crainte. Rares sont ceux qui savent attendre dans la paix, après la mort, la fin du cycle des temps où ils redeviendront de purs esprits. La plupart des ombres sont encore affamées de vie terrestre.

Au-dessus des étoiles trône le jeune dieu QuetzalcoatI entre deux dieux plus âgés. Avant de descendre sur terre. En bas: Au-dessus des étoiles trône le jeune dieu QuetzalcoatI entre deux dieux plus âgés. Avant de descendre sur terre.

 L’Épopée de Gilgamesh

Comme le relatent les tablettes de Gilgamesh, le monde mésopotamien vivait dans la noire et obsédante certitude d’une mort sans espoir. Il souligne la croyance dans l’existence d’un royaume peuplé de dieux immortels créateurs d’une espèce humaine frustrée de ce privilège. Gilgamesh est le seigneur d’Ourouk, en Mésopotamie. Pour deux tiers dieu et un tiers homme, il tire tant de vanité de sa nature que les dieux, pour rabattre sa superbe, créent le guerrier Enkidou, dont la force égale la sienne. Au cours de leur première rencontre, ils se livrent un terrible combat puis, devenus amis inséparables, ils se rendent ensemble dans la grande forêt pour tuer Khumbaba, « le Grand Mal ».

A leur retour, la déesse Ishtar demande à gilgamesh de l’épouser, mais celui-ci refuse. Folle de colère, elle demande à Anou, son père, renvoyer un taureau céleste pour ravager le pays. Gilgamesh et Enkidou le mettent en pièces. Mais les héros devront payer ce crime. Enkidou tombe malade et meurt.

Désespéré de la mort d’Enkidou, il a demandé conseil à Sidouri, déesse du Vin et de la Sagesse, et celle-ci lui a suggéré de chercher le passeur et de traverser les eaux amères de la mort pour aller trouver Outa-napishtim, l’ancêtre de l’humanité, afin de savoir pourquoi les hommes sont condamnés à mourir.

Le PASSEUR DES DIEUX Ourshanabi fait traverser l’océan à Gilgamesh. «En trois Jours ils avancèrent comme si le voyage avait duré un mois et quinze jours.» Le passeur dirige l’embarcation à ta perche tandis que Gilgamesh fait office de mât car il a brisé les pierres sacrées qui permettaient à l’embarcation de naviguer en sécurité dans ces eaux périlleuses. Lorsque Gilgamesh atteint le rivage lointain, il rencontre Outa-napishtim et lui dit son désespoir de la mort d’Enkidou : « C’est la mort de mon frère qui me fait craindre la mort. C’est la mort de mon frère qui me fait errer dans le désert. » Outa-napishtim lui dit alors que la mort est comme le sommeil, elle est le lot de tous, et nul ne doit la craindre. Puis il lui raconte l’histoire du Déluge.

Le DÉLUGE Outa-napishtim, le seul homme qui ait survécu au Déluge, vivait dans la cité de Shurrupak, où il servait le dieu Ea. Mais la ville et les dieux se firent vieux, et la déesse Ishtar provoquait de telles querelles parmi les hommes que les dieux ne pouvaient plus dormir. Enlil, dieu de la Terre, du Vent et des Airs, dit alors : « Que les eaux envahissent la terre et les noient tous. » Les dieux ayant approuvé cette décision, Ea avertit Outa-napishtim du désastre imminent et lui conseilla de construire un bateau et de faire monter à bord deux créatures de chaque espèce. Pendant sept nuits la tempête fit rage, jusqu’au jour où le monde entier fut recouvert par les eaux et où le bateau s’échoua sur le mont Nisir. Pour évaluer le niveau de l’eau, Outa-napishtim lâcha une colombe, puis une hirondelle, puis un corbeau. Le corbeau ne revint pas, et Outa-napishtim comprit qu’il avait trouvé où se poser, et que les eaux commençaient à baisser. Pour montrer aux dieux sa reconnaissance, il alluma un feu afin de leur offrir un sacrifice. Lorsqu’il sentit la fumée, Enlil entra en colère, mais Ea le sage intercéda et Enlil conféra l’immortalité à Outa-napishtim et à sa femme, qui devinrent les ancêtres de tous les hommes.

Au retour, Gilgamesh découvre une plante qui rend la jeunesse aux vieillards. Hélas, un Jour, alors qu’il s’est arrêté au bord d’une fontaine pour étancher sa soif, un serpent dérobe le rameau magique. Depuis lors, les serpents se régénèrent par la mue, mais les humains continuent de vieillir.

Si l’on n’y trouve aucune référence à l’âme ou à la conscience un passage rappelle les différentes phases classiques d’une EMI : traumatisé par la mort de son meilleur ami, Enkidou, Gilgamesh part pour le royaume des dieux — avec son corps — pour y rechercher le secret de l’immortalité. Cette éternelle quête de l’humanité, est donc déjà exprimée ici ! (…) Dans ce long poème, la condition humaine, le mystère de la mort et la peur qu’il suscite, touchant même les plus grands héros, le désir, puissant mais voué à l’échec, de l’immortalité, occupent déjà une place centrale.

Les Passeurs

Les passeurs mythiques

Le voyage non définitif dans l’au-delà est réservé à des êtres d’exception, initiés à cette expérience et marqués le plus souvent dans leur corps par la transmutation spirituelle que cette expérience opère. Le chamanisme ouralo-altaïque constitue l’exemple le plus ancien de ces pratiques.

Les véhicules qu’utilisent ces passeurs sont souvent des nefs, quelquefois des chariots ou des rondins de bois. Le passage est risqué et il n’est pas rare que des âmes s’enfoncent dans les eaux, tombent dans un gouffre. Selon l’historien des mentalités Carlo Ginzburg, il est possible de déceler un caractère commun à tous ces passeurs, qu’ils partagent avec tous les héros mythologiques qui ont eu accès à l’au-delà : ils ont un défaut de déambulation, et ceci dans des contextes culturels extrêmement différents. Ainsi, de la lutte qu’il livre près du fleuve Yabboq contre un être non nommé mais qui est sans aucun doute Dieu, Jacob revient en boitant parce que Dieu « lui a touché le nerf de la cuisse » (Genèse, XXXII, 23-33). Dans le monde grec, Ulysse qui se rend au seuil de l’Hadès pour évoquer les morts (Odyssée, XIX) porte une cicatrice à la jambe ; Pythagore, le mage orphique, a une cuisse d’or et Empédocle, mage lui aussi, disparaît dans l’Etna en ne laissant qu’une seule sandale ; Jason revient tuer son oncle Pélias pour accomplir une prophétie avec un pied nu ; Persée tue Acrisios avec une seule sandale confiée par Hermès, lui aussi passeur aux Enfers.

Oedipe, c’est-à-dire « pied gonflé » en grec, petit-fils de Labdacos, « le boiteux », est sans doute le boiteux le plus célèbre. Même Cendrillon, qui a passé la limite du jour et est allée dans le palais du prince comme en enfer, revient avec une seule sandale. Tous attestent leur déséquilibre entre le sort humain et celui du héros, un pied dans un monde, un pied dans l’autre, sans que l’on puisse affirmer que cette caractéristique déambulatoire est un stigmate du voyage sacré ou l’un des moyens nécessaires à un tel voyage.

Or ces héros mythologiques partagent une autre caractéristique, qui tient cette fois à leur voyage vers le monde d’ici-bas depuis l’au-delà : Oedipe, comme Mélampous (« pied noir »), devin et guérisseur de Thessalie, tout comme Jason, ou comme Persée et même Cendrillon, ont été renvoyés à l’invisible au moment de leur naissance.

L’Âme

Toutes les mythologies du monde cherchent à conférer à l’univers sensible du quotidien une essence invisible, subtile, que l’on pourrait dénommer « âme » ou «’ esprit ». L’essence spirituelle d’objets impressionnants, tels que le soleil, est tout naturellement considérée comme une divinité particulièrement puissante. Il en va de même pour la lune, la terre et des éléments spectaculaires du paysage, tels que montagnes, lacs ou grands arbres.

Le principe immatériel qui survivrait après la mort est souvent perçu comme un double impalpable et invisible échappant par sa subtilité même à la destruction du corps. Dans l’animisme plus évolué des sociétés archaïques, écrit L. V. Thomas1, « on s’efforce de nier la mort en affirmant qu’elle est privation existentielle et l’existence est alors celle de l’individu, plutôt que négation essentielle : destruction du tout apparent qu’est le moi, mais jamais destruction de tout.

L’Immortalité

Les mythes ne se bornent pas à nous conter ce qui se passe après la mort, mais aussi comment la mort a été introduite dans le monde. Si l’on en croit les Zoulous, tout cela est le fruit d’une regrettable erreur. Le Très Grand a envoyé Unwabu, le caméléon, dire à son peuple qu’il vivrait éternellement, mais l’animal traîne en route et se fait dépasser par Intulo, le lézard, porteur d’un message annonçant que tous les hommes sont condamnés à mourir. Des héros s’essaient à vaincre la mort. C’est le cas de Maui, de Gilgamesh et des jumeaux héroïques des Mayas.

La boîte de Pandore

Pandore, la première des mortelles, a été créée par plusieurs dieux, sur ordre de Zeus qui voulait semer la panique sur terre après le vol du feu par Prométhée. Héphaïstos lui donna sa forme, Aphrodite sa beauté, Hélios lui apprit le chant, et Hermès la flatterie et la tromperie. Athéna, enfin, la vêtit. Prométhée avait ordonné à Épiméthée de refuser tout cadeau de Zeus, mais, quand il vit Pandore, incapable de refuser, il l’épousa. Celle-ci ouvrit alors la boîte interdite et lâcha sur terre tous les maux qu’elle renfermait, apportant ainsi le chaos. Seule restait au fond l’Espérance aveugle. Pandore la persuada de sortir pour consoler l’humanité.

Vishnou

Un jour, les dieux indiens se rassemblèrent autour du mont Mérou, le nombril du monde, pour trouver le moyen de se procurer l’amrita, élixir d’immortalité caché dans les profondeurs de l’océan. Vishnou eut alors l’idée de baratter la mer pour le faire remonter à la surface. Tous se mirent alors au travail. Le serpent Vâsouki leur servit de corde, et ils utiliserent comme moyeu de la pale le mont Mandara, posé sur une tortue géante. Les deva, dieux favorables aux humains, saisirent l’une des extrémités de Vâsouki et les asura (ou anti-dieux), l’autre. Chaque groupe tirant de son côté, l’axe se mit à tourner dans un sens puis dans l’autre, barattant la mer qui devint bientôt laiteuse et finit par se transformer en beurre.

Les dieux poursuivirent leur travail et, peu à peu, quatorze  » choses précieuses  » émergèrent les unes après les autres, parmi lesquelles le soleil, la lune, Laksmî (la femme de Vishnou) et enfin Dhanvantari, le médecin des dieux, portant l’amrita. Les deva et les asura réclamèrent bruyamment leur part de l’élixir, mais Vishnou les en empêcha par la ruse ; seul Râhu,  » l’Arracheur « , un démon monstrueux, parvint à en avaler une petite gorgée. Pour l’empêcher de devenir tout entier immortel, Vishnou lui coupa la tête. Celle-ci, devenue immortelle, déclara la guerre à Soma, le dieu-lune, qu’elle avale et régurgite alternativement dans l’espoir d’y gagner un peu plus d’immortalité (soma signifie également  » immortalité « ).

La perte de l’immortalité

Chez les Ganda qui vivent au nord des rives du lac Victoria, on raconte cornment Kintu, un immigrant étranger qui fonda la dynastie royale du Buganda, alla chercher une femme au ciel. Le Dieu suprême lui donna sa fille Nambi. Il prévint son nouveau gendre que s’il ne regagnait pas sans tarder la terre avec sa femme, il serait accompagné du frère de Nambi, Walumbe, qui signifie « mort « . Kintu partit comme convenu avec Nambi, mais celle-ci réalisa en chemin qu’elle avait oublié de prendre des graines pour nourrir les poulets offerts par le Dieu suprême. Kintu essaya en vain de l’empêcher de faire demi-tour ; quand Nambi eut rattrapé Kintu, son frère Mort la suivait. Il élut domicile auprès du couple. Depuis ce temps, tous les hommes sur terre sont mortels.

Dans un mythe des Dinka, pasteurs du Soudan méridional, c’est également une femme qui est responsable de l’apparition de la mort sur terre. Au commencement, le Dieu suprême donna un Jour un seul grain de millet au couple Garang et Abuk pour subvenir à leurs besoins. Mais l’avide Abuk voulut planter davantage de grains et blessa involontairement le Dieu suprême avec l’extrémité de sa houe. La divinité courroucée décida alors de prendre ses distances à l’égard de l’humanité et envoya un oiseau bleu couper la corde qui reliait le ciel et la terre. Depuis ce temps, croient les Dinka, les humains doivent travailler dur pour se nourrir et souffrent de maladies et de mort.

Les aborigènes australiens

La mort n’était pas inévitable, et les héros ancestraux du Temps du Rêve avaient eu l’occasion de vivre éternellement. Cependant, à cause de la rancune, de la bêtise ou de la cupidité, l’humanité perdit le don d’immortalité. Seuls le conservèrent la lune, qui croît et décroît chaque mois, et le crabe, qui se débarrasse de son ancienne carapace avant d’en faire pousser une nouvelle.

Selon les Worora du district de Kimberley, Widjingara fut le premier être humain à mourir, tué dans un combat contre des êtres wandjina qui voulaient voler une femme promise en mariage à quelqu’un d’autre. Widjingara lutta pour faire respecter les règles du mariage établies par Wodoy et DJunggun. Son cadavre fut déposé dans un cercueil d’écorce et son épouse, Python à Tête Noire, prit le deuil. Elle se rasa les cheveux puis se couvrit la tête et le corps de cendres, instituant de la sorte les signes traditionnels du deuil aborigène. Lorsque Widjingara revint de sa tombe, son corps régénéré, Python à Tête Noire se mit en colère : « Pourquoi es-tu revenu ? lui demanda-t-elle. Regarde-moi, Je me suis déjà rasé la tête et l’ai noircie de cendres ! » Widjingara, qu’irrita profondément l’accueil peu aimable de son épouse, s’en retourna indigné dans sa tombe.

Plus tard, il fut transformé en dasyure, un marsupial nocturne ressemblant au chat. Dès lors, toute possibilité de régénération était perdue. Chaque homme était désormais mortel, et le python porterait éternellement le deuil. Jusqu’à ce que les missionnaires s’opposent au début du XXe siècle à cette coutume, les Worora couchaient leurs morts sur une plate-forme funéraire et laissaient le cadavre se dessécher ; les ossements étaient ensuite recueillis puis ensevelis dans une grotte de la région natale du mort. Si la plate-forme funéraire n’était pas soigneusement édifiée, on pouvait parfois voir le Chat d’Australie, incarnation vivante de Widjingara, accomplir son office de charognard sur le cadavre en décomposition.

Les pasteurs nuer du Soudan méridional racontent qu’une corde reliait autrefois le ciel et la terre ; toute personne âgée qui y montait, redevenait Jeune grâce au Dieu suprême. Un jour, une hyène et un tisserin grimpèrent à la corde et entrèrent au ciel. Le créateur donna alors des instructions afin que ces visiteurs soient surveillés de près et qu’ils ne puissent pas retourner sur terre où ils seraient certainement la cause de troubles. Une nuit, ils s’échappèrent et redescendirent. Au moment où ils allaient toucher le sol, la hyène coupa la corde. La partie supérieure fut aspirée vers le ciel ; il n’y eut alors plus de possibilité pour les êtres humains de s’y rendre, et depuis ce jour, ils vieillissent et meurent.

Les Kuba du Zaïre racontent l’origine de la mort dans une version de leur mythe de création. Le créateur Mboom ou « Eau Originelle », avait neuf enfants, tous appelés Woot. Ils intervinrent chacun à leur tour dans la création du monde. Woot l’inventeur de ce qui porte des piquants comme le poisson et les épines, se bagarra avec Woot, l’aiguiseur de couteaux, qui façonna les premières lames aiguisées. La mort survint dans l’univers quand Woot l’inventeur de ce qui porte des piquants fut tué par une lame tranchante.

En Chine

Au commencement il y avait dix soleils, les fils de Di]un, l’empereur du Paradis de l’Est et de sa femme Xi He, déesse du Soleil. Ils habitaient un énorme mûrier qui poussait dans les eaux de la vallée du Paradis. Ces eaux étaient toujours en ébullition, car tous les soleils y prenaient leur bain. Le matin, les soleils, chacun à leur tour, montaient briller dans le ciel tandis que les autres se reposaient dans l’arbre. Mais un jour, las de cette vie trop régulière, ils se ruèrent tous ensemble dans le ciel où ils se mirent à courir comme des fous pour s »amuser. Leur puissance multipliée par dix avait déjà commencé à brûler gravement la terre, mais quand leurs parents leur dirent de se conduire dignement ils ne voulurent rien écouter. Alors, Di jun envoya son archer Hou Yi leur faire la leçon. Mais Yi tua de ses flèches neuf soleils. Di]un, au désespoir, priva Yi et sa femme Chang E de leur immortalité et les chassa du Paradis.

Rêves

Dialogue avec les dieux

Outre l’extase prophétique, le rêve était pour les Anciens une autre forme du dialogue avec les dieux. Dans l’Antiquité, on ne rêvait pas comme on rêve aujourd’hui : non seulement les interprétations données étaient différentes, mais l’expérience onirique elle-même était autre. Le rêve était vécu non comme une manifestation de notre subjectivité, de notre inconscient, mais comme un fait objectif, la visite réelle, mais dans un autre ordre de réalité, d’un messager venu d’ailleurs, dieu, ancêtre ou ami mort. Certains rêves, très fréquents dans l’Antiquité, ont disparu aujourd’hui : les rêves d’avertissement ou de conseil, expérience différente de la vision prophétique qui préfigure en clair l’événement à venir. Le « visiteur » onirique manifeste une présence objective : il se fait reconnaître à certains signes, il se trouve dans la pièce où le rêveur s’est endormi, il s’adresse à lui comme on le fait dans la vie ordinaire et lui révèle un secret sur l’avenir ou un danger qui le menace.

Les rêveurs privilégiés qui reçoivent ce type de messages « envoyés par les dieux sont habituellement des rois ou de hauts personnages. Actes politiques ou religieux, constructions d’édifices, décisions d’alliance ou entreprises belliqueuses ont souvent eu pour origine un rêve. Des inscriptions mises au jour par les archéologues et des textes historiques en témoignent. Pour provoquer ces rêves divins, un certain nombre de techniques furent mises au point : isolement, prières, jeûne, sommeil sur la peau d’un animal sacrifié, et surtout « incubation », sommeil dans un lieu consacré aux dieux ou près de la tombe des ancêtres, que les Égyptiens pratiquaient depuis le XVe siècle avant J.-C.

Des papyrus magiques, sorte de clé des songes, montrent que certaines de ces pratiques vont même jusqu’à l’automutilation, comme chez les Indiens d’Amérique : en s’amputant d’une phalange d’un doigt ou d’un orteil, en se coupant un morceau d’oreille, on est sûr de provoquer la venue d’un « visiteur » nocturne. Très rares, avant l’époque romaine, sont les traces de scepticisme à l’égard de Delphes, des prophéties en général et des rêves. L’Antiquité n’accepta jamais entièrement des explications rationnelles. Si leurs analyses et leurs observations ont abouti parfois à des théories que la science moderne n’a pas encore dépassées, les Anciens gardèrent la conviction qu’existaient, à côté de la voie royale de l’intelligence, des chemins plus secrets. Sans doute avons-nous perdu aujourd’hui une certaine sensibilité qui ouvrait l’accès à l’invisible si présent aux hommes de l’Antiquité.

Le rêve du Chaman

Nombre de populations croient que l’individu quitte temporairement son corps pendant l’état de rêve, à la découverte d’autres mondes et à la rencontre d’autres esprits, y compris de défunts. Ces périples nocturnes offrent matière à de nombreux mythes, comme en Amérique du Nord et en Asie du Sud-Est, où l’on suppose que celui qui erre ainsi est susceptible d’être fait prisonnier par quelque être ou sorcier maléfique et devra être secouru par un chaman.

Symboles

Le Phénix, oiseau fabuleux

Le Phénix, oiseau fabuleux qui renaît toujours de ses cendres, est le symbole de résurrection le plus répandu dans le monde. Sa légende trouve son origine à Héliopolis, ancienne ville égyptienne où l’on vénérait le dieu du Soleil, Râ, dont le héron Bennou (nom du Phénix en Egypte), serait une incarnation. Les mythes diffèrent sur quelques points de détail – la couleur du plumage, par exemple -, mais ils relatent tous à peu près la même histoire. Le Phénix, unique oiseau de son espèce, était un animal fabuleux, doté d’une longévité miraculeuse (cinq cents ans ou plus, d’après certains auteurs), qui avait le pouvoir de renaître de ses cendres. Quand l’heure de sa fin approchait, il se construisait un nid d’herbes aromatiques, puis s’exposait aux rayons du soleil et se laissait réduire en cendres. Trois jours plus tard, il renaissait. Alors qu’il ne représentait, au début, que l’apparition et la disparition cycliques du soleil, le Phénix devint rapidement un symbole de résurrection ; il incarne l’âme ou l’immortalité dans les différentes iconographies. Les créatures ailées figurées au-dessus d’un bûcher funéraire ou s’échappant du corps d’un défunt ne sont pas toutes, pour autant, un phénix. Il peut s’agir d’un autre oiseau, un aigle, par exemple, qui symbolise parfois l’âme des empereurs.

L’Oiseau, symbole de la résurrection du chaos est très fréquent en Chine et au Japon et constitue un parallèle intéressant avec le Phénix mythique des Égyptiens et plus tard avec celui des Grecs et des Romains. D’une façon générale. L’Oiseau est le symbole de l’âme, de la renaissance, mais aussi de l’esprit et de la lumière. Dans la tradition chinoise, l’oiseau légendaire Feng-Huang (ci-contre), qui symbolise le bonheur conjugal, est l’équivalent du Phénix; il est issu de l’union des forces solaire et lunaire.

Êtres mythiques ailés

Nombreuses sont les illustrations où l’on retrouve le symbole quasi universel de l’âme métamorphosée en oiseau après la mort. Et si le mort n’apparaît pas toujours sous l’apparence d’un oiseau, il n’en demeure pas moins associé à des êtres mythiques ailés, des anges ou des insectes. Le symbolisme de l’oiseau a donc un rapport étroit avec l’âme désincarnée que l’on suppose capable d’évoluer dans les airs avec l’aisance de l’oiseau. Les oiseaux des morts, chouettes, corbeaux, faucons, relèvent aussi de ce symbolisme.

Dans la religion de l’ancienne Egypte le ba est la partie de l’âme qui, sous l’apparence de l’oiseau, vole vers le ciel, tandis que le ka, demeure dans la momie.

Les harpies et autres créatures ailées emportent les âmes vers les champs de l’au-delà, et les anges, dans la tradition manichéenne et chrétienne, accompagnent les âmes vers le ciel et vers la lumière divine. Chez les Mayas ou chez les peuples shamanistes d’Asie centrale on pensait que l’âme, au moment de la mort, s’envolait par la bouche sous forme d’un oiseau.

Le guide des morts (psychopompe), tel Hermès chez les Grecs, peut revêtir aussi l’apparence d’un chien ou d’un loup, ainsi que le représente la mythologie égyptienne avec Anubis à la tête de chacal. Ce guide des âmes pouvait être celui des destinées, apparaissant sous les traits d’un bon ou d’un mauvais génie qui accompagne l’homme sa vie durant et jusque dans l’au-delà, où il se faisait alors l’avocat de l’âme devant le juge des morts.

Chez les Dayaks de Bornéo on a trouvé un dessin représentant le défunt avec au-dessus de la tête une abeille, symbole de l’âme.

Les Bénins d’Afrique représentent un démon de la mort à tête démesurée.

Le voyage

L’idée que l’homme mythique se faisait du grand voyage dans l’au-delà était celle d’un cheminement aussi pénible que périlleux. Toute représentation de l’au-delà repose nécessairement sur des concepts et des dimensions du monde terrestre. Les dieux descendent de hauteurs inaccessibles pour se rendre sur la terre, d’où part un chemin qui mène l’homme vers les enfers ou vers un au-delà libérateur qui, à son tour, ressemble au ciel. Des chemins ascendants et descendants permettent aux âmes de franchir le passage de la mort. Au cours de leur voyage, elles arrivent au séjour des morts que le mythe plaçait souvent dans les nuages ou dans la lune. Le voyage dans l’au-delà mène dans un monde inconnu, par un chemin hérissé de dangers et d’obstacles, d’autant plus menaçants qu’ils sont imprévisibles. Des rites et des cérémonies furent donc instaurés pour assurer la protection des âmes durant leur voyage vers l’au-delà.

Dans une barque du soleil, le dieu-soleil Râ à tête de bélier navigue sur le Nil en direction de l’est. Selon le Livre des Morts égyptien, la traversée nocturne du soleil symbolise le cheminement de l’âme à travers les enfers, vers la renaissance.

Dans l’Irlande celtique on amenait les morts au pays des âmes en un dernier voyage par la mer. Les Vikings avaient également fait du bateau un don funéraire pour la grande traversée. La conduite des âmes revêt une grande importance dans le shamanisme et dans le rituel funéraire tibétain ; en Egypte, les dons funéraires symboliques d’une grande richesse avaient pour fonction d’assurer à l’âme un certain bien-être dans l’autre monde, ainsi que le prouvent les pyramides et les chambres mortuaires de la Vallée des Rois.

Le pont du jugement

Le symbolisme du pont est très répandu ; il manifeste la difficulté du passage dans l’au-delà. Le pont chinvat, qui signifie le « diviseur » ou « trieur » dans la tradition iranienne, est un passage périlleux, large pour les justes, étroit comme une lame de rasoir pour les impies. Dans l’islam, ce pont, plus fin qu’un cheveu et plus tranchant qu’un sabre, s’appelle tantôt « la voie de l’enfer », tantôt « la voie droite » que suivent les croyants. Seuls les élus le traversent, les damnés sombrent dans l’enfer…

L’élu franchit le pont plus ou moins vite selon la qualité de ses actions ou la force de sa foi. Il est remarquable que le titre de pontifex, qui fut celui de l’empereur romain et demeure celui du pape, signifie « constructeur de ponts ». Le pontife est à la fois le constructeur et le pont lui-même, comme médiateur entre le Ciel et la Terre. Bouddha est aussi considéré comme le Grand Pont. Lieu du passage, le pont figure l’inévitable épreuve morale qui place l’homme devant l’obligation de choisir. Son choix le damne ou le sauve. C’est ce qu’exprime un autre symbole du jugement, la balance.

Dans l’Égypte ancienne, le défunt devait faire admettre son innocence devant le tribunal d’Osiris ; la pesée du cœur, celui-ci révélant sa légèreté ou sa lourdeur devant la vérité, témoignait pour ou contre le défunt. Ce thème sera repris dans l’iconographie chrétienne, où l’archange saint Michel surveille les plateaux de la balance. Au Tibet, ceux-ci sont respectivement chargés de cailloux blancs et de cailloux noirs qui répartissent les bonnes et les mauvaises actions. En Perse, l’ange Rashnu pèse les esprits sur le pont du destin. La vie humaine est ainsi passée au fil de l’épée, mesurée à l’aune des principes divins du vrai et du bien : celui qui aura emprunté la bonne voie sera justifié car les actes de l’homme ici-bas engagent son avenir céleste.

L’échelle du salut

L’échelle est un symbole universel de l’ascension graduelle de l’âme, dont le terme consiste en la vision béatifique : elle apparut à Mahomet lorsque celui-ci fut ravi aux Cieux. Sa verticalité met en rapport les différents mondes de l’au-delà. Dans de nombreuses traditions, en effet, l’au-delà possède une structure bipolaire et stratifiée. Dans la mythologie sumérienne, le christianisme, l’islam, l’hindouisme, le bouddhisme, le jaïnisme et les religions précolombiennes, le paradis est associé aux plus hautes régions du Ciel tandis que les régions infernales sont souterraines.

La psychologie contemporaine, en particulier à travers l’œuvre de Jung, a mis en lumière le rôle des symboles dans l’évolution psychique individuelle et l’édification des sociétés humaines. Les représentations symboliques de l’enfer et du paradis rendent compte des processus mentaux à l’œuvre dans la conscience des mourants. Elles semblent correspondre au conflit mis en évidence par Jung entre le Moi, la conscience limitée, et le Soi, qui constitue la totalité psychique d’où émanent les images symboliques. Tandis que le Moi tend à rester prisonnier des conditionnements multiples de l’existence, le Soi vise à réaliser les aspirations inconscientes du sujet en quête d’une plus grande plénitude de vie.

Ainsi ceux qui n’arrivent pas à gravir l’échelle du salut sont hantés par le souvenir de leurs mauvaises actions : ils perdent l’équilibre, chutent et deviennent la proie facile des démons du tourment et de la culpabilité ; cette souffrance morale est symbolisée par le feu dévorant de l’enfer. L’engloutissement dans la gueule du monstre sanctionne l’incapacité de l’âme à se purifier de la mémoire du passé. Inversement, la rencontre avec des entités lumineuses toujours bienveillantes, anges ou divinités, signifie que les âmes ayant surmonté les obstacles psychologiques peuvent libérer des forces ascensionnelles et s’ouvrir à l’expérience de la transcendance.

Roue de la vie

Bien que séparées par des millénaires, ces deux illustrations se ressemblent et montrent la voie de la lumière et de la vie. Pour l’homme qui a pris conscience, ces deux voies n’en forment finalement qu’une seule.

Pendant la nuit, le scarabée égyptien fait rouler la sphère du soleil à travers les enfers en direction de l’orient où Horus portera l’astre à travers le jour. Toute vie est liée au soleil, et le voyage égyptien, selon le Livre des Morts, représente le périple des âmes jusqu’au moment de la renaissance de leur lumière. C’est pourquoi le scarabée se trouve dans la nuit la plus profonde au moment où le soleil entame le cycle de sa renaissance.

La roue de la vie du bouddhisme tibétain représente l’essence de toutes les doctrines de la renaissance et de la libération ou de la délivrance du cycle renouvelé des naissances. Au centre, trois animaux symbolisent le vice et sont à l’origine du demi-cercle noir de la damnation. Le demi-cercle blanc représente la manière de vaincre le mal pour accéder au Nirvana. Les six mondes sont des lieux de renaissance dans les domaines des dieux, des titans, des hommes, des animaux, des esprits de la faim et des êtres infernaux. Par ses actes, l’homme décide lui-même du domaine où il renaîtra.

Symboles de La mort

La faux et le sablier

La mort, qui suscite une crainte universelle, est au cœur de toutes les philosophies et religions du monde. En raison de sa soudaineté et de son inéluctabilité, elle est souvent évoquée par une faux, qui coupe sans discernement tout ce qu’elle trouve sur son passage.

Une faux ou une faucille est d’ailleurs fréquemment l’attribut de CRONOS, le temps qui passe, personnifié par un vieil homme montrant un sablier -autre symbole de l’écoulement du temps, qui nous invite à ne pas le gaspiller et qui suggère aussi, puisqu’il faut le retourner régulièrement, un possible recommencement.

A Cronos, l’on oppose quelquefois l’ENFANT, évocation de la jeunesse perdue, symbole de pureté, d’innocence et de spontanéité, parfois assimilé à un œuf renfermant tous les possibles. Fontaine de jouvence, nectar, ambroisie, soma, hydromel, élixir d’immortalité, les mythes abondent de produits miraculeux capables déverser le cours du temps, de procurer une jeunesse éternelle et de conduire à l’immortalité.

En Chine, les symboles de LONGÉVITÉ sont innombrables : arbres (bambou, cèdre, chêne, cyprès, myrte, palmier, sapin), fruits (cédrat, pêche, poire, pomme, prune), animaux (cigogne, colombe, crapaud, éléphant, grue, lièvre, phénix, tortue).

Rares sont les philosophies ou les religions qui, devant le caractère inéluctable de la mort, ne préconisent pas l’oubli de soi et le renoncement aux biens matériels. Dans l’iconographie chrétienne, la brièveté de la vie et la vanité des choses de ce monde sont souvent évoquées par un CRANE ou des OSSEMENTS placés à côté de signes de richesse ou de pouvoir : pièces d’or, bijoux, couronne, sceptre…

Dans les sociétés primitives, on croyait que, lors de la résurrection des corps, le squelette, qui ne disparaît pas dans le processus de décomposition, se couvrirait d’une nouvelle chair ; dans cette perspective, il fallait veiller à ce qu’aucun os ne manque. Les morts étaient donc inhumés avec soin, parfois sous d’immenses blocs de pierre, formant des sortes de maisons des morts.

En Europe du Nord, on enterrait également les animaux après une reconstitution minutieuse de leur squelette : c’était, pour les chasseurs, une façon de s’assurer de la perpétuation de l’espèce. Les mêmes pratiques existaient chez les peuples pêcheurs, qui remettaient dans l’eau les arêtes des poissons qu’ils avaient consommés.

Ces croyances sont parfaitement exprimées dans un mythe Scandinave, qui rapporte une terrible colère de Thor : alors qu’il vient de bénir avec son marteau des peaux sur lesquelles ont été reconstitués les squelettes d’animaux qui ont servi au repas, il s’aperçoit que l’une des chèvres qu’il vient de ressusciter boite : l’un des enfants de son hôte a brisé un fémur pour en sucer la moelle. Pour les alchimistes, la mort correspond à l’Œuvre au noir (nigredo), la phase de décomposition qui précède l’arc-en-ciel.

Représentation de la mort

La mort est généralement représentée par des personnages effrayants, dont l’un des plus connus en Occident est le SQUELETTE revêtu d’une cape noire à capuchon, portant une faux, un trident, une épée, ou un arc armé d’une flèche. La Mort tient souvent dans la main un sablier qui évoque la brièveté de la vie. En revanche, les dieux qui gouvernent le royaume des morts ne sont pas toujours aussi terrifiants que leurs émissaires. En Irlande, Donn, le dieu de la Mort, est aussi la source de toute vie. Dans le panthéon grec, Hadès, le dieu des Morts, avait pour surnom le Bon Conseiller, ou le Dispensateur de richesses, car il favorisait aussi les récoltes.

Dans l’Antiquité, la Mort était représentée de multiples façons : squelette, tombeau, crâne, cavalier armé d’une épée, jeune homme portant une torche à la flamme vacillante (il incarnait Thanatos, dieu de la Mort), danse macabre. Pour l’islam, Israfîl est l’ange de la mort qui rend visite aux personnes dont la dernière heure est venue. La couleur associée à la mort est le noir en Occident, le blanc en Orient. Coquelicots, asphodèles et cyprès sont quelques-uns des végétaux symboles de deuil. Les navires (nefs des morts) évoquent le voyage dans l’au-delà.

Source : http://www.outre-vie.com


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Texte partagé par les Chroniques d'Arcturius - Au service de la Nouvelle Terre